Jacques Bonnaure nous offre cette chronique à propos de l’intégrale des œuvres de musique de chambre avec piano d’André Jolivet, initiée et menée par le pianiste Filippo Farinelli :
JOLIVET : Intégrale de la musique de chambre avec piano
Grave et Gigue pour violon et piano (1932). Air pour bercer pour violon et piano (1930). Sonate pour violon et piano (1932). Aubade pour violon et piano (1932). Choral et Fugato pour piano à 4 mains (1932). Chant d’oppression pour alto et piano (1935). 3 Poèmes pour ondes Martenot et piano (1935). Ouverture en Rondeau pour 4 ondes Martenot, piano et percussion (1938). Nocturne pour violoncelle et piano (1943). Chant de Linos pour flûte et piano (1944). Petite Suite pour quintette à cordes, piano et percussion (1947). Hopi Snake Dance pour 2 pianos (1948). Air de bravoure pour trompette et piano (1952). Fantaisie-Impromptu pour saxophone alto et piano (1953). Fantaisie-Caprice pour flûte et piano (1953). Cabrioles pour flûte et piano (1953). Chant pour les piroguiers de l’Orénoque pour hautbois et piano (1953). Méditation pour clarinette et piano (1954). Sonate pour flûte et piano (1958). Patchinko pour 2 pianos (1970).
Filippo Farinelli, piano. Claudia Giottoli, flûte. Nora Cismondi, hautbois. Simone Simonelli, clarinette. David Brutti, saxophone. Vincenzo Pierotti, trompette. Roberto Costa, violon. Giovanni Menna, alto/violoncelle. Henao String Quartet. Antonio Sciancalepore, contrebasse. Nadia Ratsimandresy, ondes Martenot. Laura Mancini, percussion. Monica Cattarossi, piano.
2CD Brilliant Classics. 95275
Toute sa vie André Jolivet a composé des pièces de musique de chambre, parfois conséquentes et reconnues comme la Sérénade, les Sonates pour violon ou pour flûte mais parfois brèves. Ce sont elles surtout, parfois très méconnues qui composent ce double CD voulu et réalisé par le pianiste Filippo Farinelli et de nombreux solistes tous italiens. De la plus ancienne, Grave et Gigue pour violon et piano en 1932, à la plus récente, le bref duo de pianos Patchinko en 1970, on entend ici, en marge des grandes œuvres, comme un journal de création du compositeur, qui nous fait pénétrer dans son atelier intime. Dès les années 30, on est étonné par la diversité esthétique de Jolivet qui réunit deux voies apparemment bien éloignées, celle de Paul Le Flem, solidement ancrée dans la tradition et qui lui assure d’emblée une grande sûreté d’écriture et celle de Varèse, plus audacieuse. La Sonate pour violon de 1932 accomplit une délicate synthèse des deux canaux, et l’on pourrait en dire autant de l’étonnante Ouverture en Rondeau pour ondes Martenot, piano et percussion (1938). A l’écoute des œuvres d’avant-guerre, il est plus qu’évident que Jolivet était alors le compositeur le plus « avancé » et le plus inventif de toute l’école française (hormis Varèse qui, à cette époque, ne composait pratiquement plus). Immédiatement après la Guerre, Jolivet compose la Sérénade pour hautbois et quintette à vents dont nous avons ici la version pour hautbois et piano, Hopi Snake Dance qui témoigne, comme le Chant des Piroguiers de l’Orénoque, de la fascination de Jolivet pour les musiques « premières » puis une très agréable Petite Suite divertissante, de style néo-classique très « français ». Au début des années 50, il dédiera plusieurs pièces brèves aux J.M.F. dont le caractère cursif et pédagogique n’exclut pas l’inventivité instrumentale. Une fois encore, l’atelier est ouvert pour le jeune public. L’opus ultime, Patchinko, témoigne d’une inspiration renouvelée et toujours vivace dans les années qui précédèrent sa disparition. Cette publication constitue un élément discographique indispensable pour apprécier l’itinéraire et la prodigieuse inventivité de Jolivet.